Apres 13 séjours en Mer Rouge (dont 12 croisières) et 4 aux Maldives (dont 3 croisières), j’ai décidé de pousser un peu plus à l’Est, à Truk, le rêve pour tout amateur d’épaves, dont je suis, et à Palau (je publierai plus tard le CR sur cette partie de mon séjour en Micronésie).
Ce fut un interminable voyage, 20h de vol, 12 000 Km et 4 avions différents (Paris-Francfort-Taipei-Guam-Truk). 10 h de décalage horaire...
A Taiwan, étant arrive a 7h du matin et ayant un vol a minuit, j'ai pu profite de la visite gratuite organisée par l'office du tourisme (départ 8h retour 15h). J'ai donc pu voir, sous un grand soleil et une chaleur accablante, le mémorial de Chang Kai Shek, l’opéra, la tour 101 (actuellement le plus haut building du monde, plus de 500m) et surtout le musée national, coincé a flanc de montagne entre la jungle et les cultures de thé en terrasse.
Et ca vaut vraiment le détour !
Ensuite j'ai pu prendre un day use au CKS airport hotel histoire de prendre une douche et de dormir un peu. Pour 47 Euros, j'ai pu bénéficier d'une chambre immense et très luxueuse.
Bien m'en a pris car l’aéroport de Taipei est vraiment pourri et la clim tellement poussée a fond qu'on y a presque froid.
Pour la 1ere fois de ma vie, je suis entré sur le territoire américain a Guam, les douaniers ne tiquant même pas sur mon passeport Français (j'avais un peu peur vu le contexte international, d'un excès de zèle).
Et enfin, le Dimanche 15 Août 2004 a 21h30 heure locale, mon voyage proprement dit se terminait et les vacances commençaient vraiment.
Apres une livraison des bagages amusante et une fouille sommaire de ceux ci, nous avons pu rejoindre le bateau.
Le Thorfinn (le nom du bateau) est un ancien baleinier Norvégien reconverti dans des activités bien plus pacifiques. Il est très confortable, avec salle de bain (les douches sont bien sur à volonté) TV et magnétoscope dans chaque chambre. Les prises de courant sont au format US en 110V mais le capitaine a aménagé une armoire ou on trouve des prises Européennes à 220V, pas de problème donc pour recharger votre phare ou votre lecteur MP3
Le carré est très sympa et bien aménagé et les hôtesses sont vraiment aux petits soins pour les clients, rien à dire.
La nourriture est très bonne, et il y a des snacks (salé et/ou sucré) à volonté entre les plongées.
A la poupe, il y a un jakuzi avec de l'eau de mer a 36 degrés, ce qui est bien pratique pour se réchauffer quand on sort de la 3eme ou 4eme plongée et qu'il pleut.
Justement, il a plu le 1er jour, assez fort d'ailleurs, de vraies averses tropicales, Août est dans la saison humide, mais ensuite il a fait plutôt beau, et entre 2 nuages, le soleil tape, et il tape vraiment fort !
Nous n’étions que 5 plongeurs, 2 Américains, un couple de Suédois et moi. Les 2 derniers jours, je fut le seul client.
L'eau était a 27 degrés minimum, comme dans tout le lagon de Truk, qui est un des plus grands du monde puisqu'il fait environ 45Km de diamètre. Il n’y a quasiment pas de courant.
Il y a 6 îles principales, et le bateau est resté ancré au milieu de 3 d'entre elles, parmi les plus petites.
De temps en temps, devant la mangrove, on aperçoit les restes rouillés de barges Japonaises, ou bien dans la jungle on distingue nettement des bunkers et les canons des batteries côtières. Sentinelles oubliées, elles pointes désormais leurs tubes vengeurs vers un ennemi qui ne viendra plus, dans une version océan Pacifique du désert des Tartares.
A Truk, on ne plonge donc que sur des épaves Japonaises, il y en a une soixantaine recensées, victimes de la gigantesque bataille aéronavale qui s'est déroulée ici, 200 avions américains s’étant lancés a l'assaut ce jour la, en Février 1944.
Les guides de plongées sont des locaux, ils sont vraiment tous très sympas et connaissent les épaves comme leur poche. Les briefings se font une fois sur les sites. Sous l’eau, vous faites votre vie, ils n’encadrent que ceux qui en ont besoin ou le demandent.
Il y a peu de bateaux de guerre a proprement parlé, la plupart ont quitté le lagon avant l'attaque.
Gisent donc des cargos armés, des paquebots transformés en transport de troupes ou bien des pétroliers. J'ai même plongé sur 3 avions, un chasseur, un bombardier bimoteur et un hydravion géant quadrimoteur (dans lequel on peut rentrer). On peut également plonger sur un sous marin, mais je ne l’ai pas fait.
Le plus petit de ces bateaux fait 90m de long, le plus grand 160m, ce sont des monstres...
Mais vous pouvez oublier tout ce que vous avez vu jusqu'ici. La plupart de ces vaisseaux fantômes font passer le Togo ou le Donator pour des barques de pécheur.
Ce sont tous des Thistlegorm en puissance (il n'y a que cette épave qui tienne la comparaison, avec l’Umbria) et encore, question faune et flore, celui ci est au niveau en dessous.
Que peut on y voir ? J'y ai vu du requin gris et pointes noires, des thons, du mérou Malabar, des bancs de platax, de carangues et de barracudas, ainsi que des raies aigles (pour les plus gros). On peut y voir aussi des chars d’assaut (3 vrais tanks sur le pont du San Francisco Maru), des camions, des bulldozers, des munitions, parfois par milliers, de tous calibres, de la simple balle de fusil jusqu’à l'obus de 60cm de diamètre, des torpilles, des mines, des bombes, des fusils, des périscopes, des bicyclettes, des moteurs et des roues d'avion, parfois des avions entiers (3 Zeros en partie démontés dans les cales du Fujikawa), des citernes et des bidons de toutes tailles, des centaines et des centaines de bouteilles de saké… Ils devaient picoler un max. Remarque, en temps de guerre, on trouve son courage ou on peut...
Et je ne parle pas de l'armement des bateaux eux mêmes, canons ou mitrailleuses anti aériennes, dont certaines sont encore désespérément braquées vers le haut, dans une dernière tentative pour enrayer le destin, mais désormais figées pour l’éternité.
Nul pillage ici (on est loin de la Méditerranée), tout est laissé en place pour que les plongeurs qui suivront en profitent. Enfin, laissé en place, c’est un bien grand mot. En effet, beaucoup ont pris pour habitude, au fil des ans, de remonter les objets trouvés dans les cales ou ailleurs et de les poser bien en vue. Donc, sur certaines épaves, le pont du navire est souvent transformé en un bric à brac invraisemblable. Cela permet à ceux qui ne veulent pas trop s’aventurer à l’intérieur de voir les divers artefacts.
Le plus émouvant sans doute, c'est quand on voit des objets de la vie courante : chaussures, uniformes, pièces de vaisselle, théières, casques, lunettes, masque a gaz, outils et bien sur, parfois des restes humains, tibias, fémurs ou morceaux de crânes dans la plupart des cas.
Parfois, dans une coursive, une tache blanche émergeait de la couche de sédiments. Je me saisissais alors délicatement de l'objet et je tenais dans ma main une tasse, parfois une assiette, en porcelaine de Chine ou du Japon.
Mais rien de glauque ni de macabre dans cette émotion a extraire de la vase ces objets sortis des manufactures de Shanghai ou d'Osaka.
C'est presque avec pudeur que je les plaçais en évidence pour le regard des plongeurs suivants.
On peut rentrer très facilement dans toutes les épaves, il y en a pour tous les goûts et tous les niveaux, depuis les grandes cales avec une lumière de cathédrale jusqu'aux coursives labyrinthiques étroites et sombres, en passant par de monstrueuses salles des machines. Certaines sont posées droites (la majorité), d’autres sont couchées sur le flanc, une est renversée (mais on peut rentrer dedans par dessous sans problème). Enfin, quelques épaves gisent sur une pente et partent de la surface.
5 plongées par jour sont organisées sur le Thorfinn, à heures fixes, 8h, 11h, 14h, 17h et 20h30. C’est à la carte. J'ai fait 3 ou 4 plongées par jour (28 en tout sur 8 jours pleins, sur 19 épaves différentes), impossible de faire plus, la fatigue vous fauche très tôt dans la soirée.
Et puis, 4 plongées quand la 1ere est à 60m et les 2 suivantes entre 40 et 20m, c'est suffisant même pour un acharné comme moi. Les 4eme et 5eme plongées se font toujours sur des épaves à 20m ou moins, et on peut facilement demander à faire ou refaire telle ou telle épave.
D’ailleurs, aucun plongeur n’a fait 5 plongées par jour, même pas une seule fois.
On se rend sur les sites en speed boat en alu, en 20 minutes pour le plus éloigné.
Au bout du 3eme jour, j'en ai eu assez que mon ordinateur me donne des temps de paliers vraiment indécents, alors je l'ai mis en mode profondimètre et j'ai adopté mon propre modèle de décompression (2' a 18m, 3' a 9m et entre 10 et 12 min a 5m avec parfois un palier intermédiaire de 2' a 12m et ce quelque soit la profondeur et le numéro de la plongée). J'ai toujours fait le dernier palier au Nitrox 36, pour 8 dollars par jour et par personne la bouteille de déco (celle ci vous dure une journée entière si vous êtes le seul à pomper dessus).
Donc, Il y a toujours au pendeur au minimum 2 bouteilles (une d’air, l’autre de Nitrox 36).
Le premier jour, lors du briefing d’arrivée, le capitaine insiste bien sur le palier de 2’ à 18m, quelque soit ce que vous donne votre ordi.
Les plongées au Nitrox sont à 16 dollars. Vu le taux de change et les prix pratiqués ailleurs, ca vaut vraiment le coup, histoire d’accélérer la désaturation. C’est du reste ce que j’ai fait, en plongeant au Nitrox 32 les 2 derniers jours (sauf la 1ere plongée bien sur, en général trop profonde pour le Nitrox).
La personne qui vous gonfle votre bouteille vous fait d’ailleurs contrôler le taux d’oxygène du mélange avec un testeur électronique et vous devez signer la feuille de remplissage.
Toutes les bouteilles sont des 12 litres alu et je n’ai jamais eu en dessous de 220 bars, souvent 250.
Bref, ce fut le voyage le plus extraordinaire de ma vie, et je reviendrai à Truk, c'est sur !
Si vous aimez les épaves et que vous en avez les moyens, allez y, impossible d’être déçu.
Le Thorfinn est le meilleur bateau de Truk, son équipage est parfait ainsi que son capitaine, le légendaire Lance Higgs, un Canadien de Vancouver qui a quelques rudiments de Français et qui vous régalera avec plein d’anecdotes de plongées !