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Rencontres plongeur

Philippe Goitschel : des jeux olympiques à la plongée responsable
Plongeur.com vous propose de rencontrer Philippe Goitschel, ancien champion du monde et recordman du monde de ski de vitesse, premier skieur à dépasser les 250km/h, mais aussi fondateur de l'association respect planet, qui a pour objectif de nettoyer la nature, aussi bien dans les montagnes que sous l'eau.
Plongeur.com : Bonjour Philippe, peux-tu te présenter rapidement, et nous expliquer comment tu es passé du ski de vitesse à l'écologie, et à la plongée ?
Philippe Goitschel : Entraineur de ski alpin et professeur de golf de formation, j’ai longtemps vécu à travers le sport de compétition. Skieur de vitesse, j’ai participé aux jeux olympiques d’Albertville qui m’ont révélés leur vraie nature. La glorification du vainqueur crée une infinité de perdants, divise les gens et les peuples. Nés avec le capitalisme, le sport et les JO valorisent l’égocentrisme, légitiment consommation et gaspillage, participent à la destruction de notre environnement.
Avec mes tripes, je voyais et vivais depuis toujours la dégradation progressive et continue de notre monde par nos choix de société et nos déchets.
Puisque nous avons appris enfants à réparer ce que nous cassons, après quelques records et titres mondiaux j’ai décidé d’utiliser mes compétences à d’autres fins : Restaurer des sites naturels qui font partie de notre héritage commun.
P.Com : Concrètement quelles sont les actions menées par Respect-Planet ? Sur combien de personnes le collectif s'appuie-t-il ?
PG : Ces opérations sont menées sur des terrains aussi variés que la montagne, les cours d’eau, le monde souterrain et dernièrement, le milieu subaquatique.
De l’amont vers l’aval, les nettoyages en montagne préservent les torrents. Ceux des rivières protègent les plans d’eau intérieurs, les fleuves … et la mer. Chaque plongée ou balade en montagne donne lieu à un nettoyage, même symbolique. Lorsque de grosses quantités sont découvertes (parfois plusieurs tonnes en montagne ou en rivière) nous planifions une intervention et faisons parfois appel à des bénévoles. Quelques guides montagne et spéléo interviennent pour garantir la sécurité.
Sous l’eau, les nettoyages sont la plupart du temps confidentiels et les quantités renflouées faibles, mais leur répétition assainit réellement les sites.
Sur des fonds vaseux, sortir un déchet lourd nécessite 3 plongées : Une pour libérer la pièce du relief et des sédiments, une deuxième pour fixer les sangles de levage et la dernière pour gonfler le parachute, contrôler la charge et l’évacuer. Les plus grosses quantités sont collectées lors de journées rassemblant les clubs avec des dizaines de plongeurs.
P.Com : Quelles sont ou ont été les difficultés rencontrées ?
PG : Les bénévoles qui nous rejoignent sont tous entrainés, efficaces et désintéressés.
Les problèmes viennent des autorités. Dans 3 cas sur 4, elles refusent de participer quand elles n’interdisent pas l’intervention. Soit parce qu’elles sont soumises à la logique productiviste, soit parce que leur « intérêt » se résume à protéger leur image et leur réputation et parce qu’un déchet caché ne dérange personne. C’est le cas des déchets immergés. Leur présence est souvent niée comme à Aix les Bains. Le lac du Bourget est une poubelle, tout comme les lacs d’Annecy et du Leman.
Les plans d’eau intérieurs sont considérés comme des bases de loisirs, des sources de profits potentiels et pas comme des réserves d’eau à protéger.
P.Com : Quel sont les objets les plus souvent rencontrés ?
PG : sous l’eau, les pneus sont légion, et les pièces auto et moto d’une manière générale, les déchets du bâtiment, les encombrants, des bidons et des futs, les produits de consommation courante, mais aussi les filets de pêche fantômes qui continuent à tuer.
Nous avons récemment trouvé un matelas, un meuble de cuisine et une cuvette de toilettes entre 20 et 40m sur la côte sauvage du lac du Bourget (portion pourtant inaccessible).
En montagne, 10 tonnes de pneus et 30 tonnes de pièces mécaniques précipitées par le garagiste des Carroz d’Arâches(74), dans le torrent alimentant le village de Magland situé en contrebas.
En spéléo, les guides et la fédération prennent désormais soin des itinéraires équipés. Il existe cependant de nombreuses cavités ayant servi de décharge sur plusieurs générations, et toujours souillées car non touristiques.
P.Com : As-tu un message à faire passer ?
PG : Tout déchet, abandonné à terre finira en mer. Les océans sont en train de mourir. Nous courrons à la catastrophe.
Nous finirons par explorer des déserts peuplés de méduses au milieu des particules de plastique. Et je ne parle pas de la pollution chimique et de la surpêche.
La communauté des plongeurs a une belle et urgente mission à mener : Informer du rôle vital des océans sur la biosphère et participer à la protection de l’eau ... à tous les étages.
Au-delà de ça, le meilleur déchet étant celui qui n’existe pas, la seule solution viable est d’arrêter de consommer.
Pour en savoir plus : www.respect-planet.com
Photos : Philippe Goitschel, Yves Croce, Respect Planet
- Biologie sous-marine, Faune et Flore
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