16/06/2010
par Plongeur.com
L'expédition TARA OCEANS - J + 9 mois
Cela fait 9 mois que l’expédition Tara Oceans a débuté pour une mission de trois ans autour du monde, dans le but d’étudier divers écosystèmes. Tara est devenue un véritable laboratoire naviguant reconnu, équipé d’un matériel scientifique des plus sophistiqués. Que peut-on dire au bout de 9 mois d’expédition ?
bord de Tara, les écosystèmes marins étudiés sont les écosystèmes planctoniques (le plancton est l’élément-clé de la biosphère pour les grands équilibres de notre planète), depuis les virus jusqu’aux larves de poissons, ainsi que certains écosystèmes coralliens peu ou pas étudiés jusqu’alors.
Pour plus d’informations visitez le site de l’expedition.
Tara vu du mât
© S.Bollet/Fonds Tara
Cette étude permet non seulement d’étendre la connaissance de la biodiversité du milieu marin mais aussi d’évaluer les effets du réchauffement climatique sur les eaux de surface, et en particulier le blanchiment des coraux et donc de leur détérioration qui, à terme, peut conduire à leur disparition.
Ce qui peut être dit après 9 mois d’expédition
? Seulement après 2 mois d’expédition, l’ensemble des protocoles imaginés par le consortium scientifique OCEANS et l’équipe de Tara Expéditions, puis mis en place à bord, avaient été validés. ? Un satellite fournit avec succès des informations sur les courants et facilite le choix de la position des prélèvements à réaliser, avant l’arrivée de Tara. ? 56 stations d’échantillonnages concernant les écosystèmes planctoniques ont déjà été réalisées en Atlantique, Méditerranée, Mer Rouge, Mer d’Arabie, Océan Indien, couvrant une grande variété.1 2
1- La rosette CTD est un système de prélèvement des échantillons d’eau de mer.
Rosette pour sa forme ronde, CTD pour Conductivity, Temperature, Depth.
© J.Girardot/Fonds Tara
2- En station. © D.Sauveur/Fonds Tara
Il s’est avéré que les échantillons ainsi obtenus sont de très bonne qualité et exploitables :
- ainsi à l’aide de microscopes automatisés, la quantification des groupes d’organismes depuis les virus jusqu’aux larves de poissons a déjà commencé et est même terminée pour certaines stations de prélèvements ;
- de nouveaux virus bactériens ont pu être découverts en grand nombre ;
- différentes communautés de protistes ont déjà pu être identifiées ;
- le séquençage moléculaire massif d’organismes microscopiques (entre quelques microns et un millimètre) a commencé au Genoscope et fonctionne. En comparant les séquences trouvées en utilisant cette nouvelle méthode, avec celles déjà présentes dans les bases de données mondiales, on peut effectivement caractériser la biodiversité globale des stations échantillonnées. Ces premières estimations confirment que nous ne connaissons qu’une infime partie de ces organismes microscopiques.
Cotylorhiza tuberculata alias les méduses oeuf au plat au large de Malte.
© F.Limena/Fonds Tara
? Une espèce de Amphioxus avec des yeux et un cerveau primitifs a été découverte et constitue un « lien manquant » dans l’évolution des métazoaires.
? Une expérience visant à étudier un tourbillon au sud de Chypre en utilisant des planeurs sous-marins (gliders) a été un grand succès.
Pour se déplacer, le glider possède une paire d’ailes et un gouvernail. Tous deux sont fixes.
Ce sont les masses situées à l’intérieur de l’engin – en l’occurrence les piles –
qui peuvent bouger de gauche à droite.
Leurs mouvements déséquilibrent l’engin et permettent de tourner d’un côté comme de l’autre.
© D.Sauveur/Fonds Tara
? Tara se plie aux contraintes, c’est un navire qui a un faible tirant d’eau.
- 28 plongées ont été effectuées sur le site corallien environnant Djibouti qui n’avait pas été étudié depuis 18 ans.
- 17 plongées sur le site de Saint Brandon (un atoll corallien jamais échantillonné dans l’Océan Indien au Nord de l’Ile Maurice).
- Et une vingtaine de plongées sont en cours sur le récif corallien de Mayotte où Tara se trouve actuellement pour une escale de 3 semaines.
Aux îles Moucha (Djibouti), Tara mouille près d’un récif corallien
© J.Girardot/Fonds Tara
? L’échantillonnage des récifs coralliens a été un succès total et l’analyse des échantillons a tout juste commencé. Mais déjà, les résultats montrent que le blanchiment du récif est très important. Ce phénomène est sans doute lié à la présence d’eaux chaudes dans les eaux de surface dans le lagon de Mayotte. Un fort taux de mortalité corallienne dans la partie nord du lagon a également pu être révélé. Même observation sur le banc de l’Iris, banc d’une profondeur de 15 mètres se situant pourtant au large, à 10 miles au nord de Mayotte et donc peu soumis à l’évolution des eaux du lagon. Ce constat est d’autant plus alarmant qu’il concerne un des plus riches lagons au monde en ce qui concerne la biodiversité corallienne.
Les plongées se répètent deux à trois fois par jour. Elles durent une heure en moyenne.
© J.Girardot/Fonds Tara
En conclusion, bien qu’il soit trop tôt pour parler de véritables résultats scientifiques complets, on peut d’ores et déjà dire, après seulement 9 mois, que l’expédition est un succès.
C’est une véritable prouesse méthodologique de faire tant de prélèvements et d’analyses sur Tara. La récente réunion des coordinateurs scientifiques de Tara Oceans a confirmé que la méthodologie d’échantillonnage fonctionne correctement et délivre des données de haute qualité. L’échantillonnage en haute mer correspond aux plans de travail en tenant compte des aléas diplomatiques et de sécurité (état de la mer, piraterie). L’analyse des données est scientifiquement très prometteuse et les premiers résultats confirment qu’en certains endroits l’environnement marin est menacé et demande à être protégé sans plus attendre. L’équilibre entre l’activité humaine et un milieu naturel hautement fragilisé doit être rétabli.
Échantillon d’Acropora prélevé à Djibouti
© J.Girardot/Fonds Tara
Cette extraordinaire circumnavigation des deux hémisphères et de 150.000 km est aussi l’occasion de rencontrer des scientifiques locaux, ce qui permet la création d’un réseau scientifique qui s’étendra au-delà des 3 ans de l’expédition. En effet, des liens scientifiques avec des Instituts, laboratoires et chercheurs ont pu être établis dans tous les pays visités par l’expédition. Les spécialistes locaux font partie de la communauté de scientifiques qui analyse les données océanographiques et biologiques, ces données qui seront à la disposition de la toute la communauté scientifique.
Légende photo chapeau : Tara passe le canal de Suez (Egypte)
© D.Sauveur/Fonds Tara
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